MAXIME BERNIER
Candidat à la chefferie
Du Parti Conservateur du Canada
Pour une vraie concurrence dans le secteur des télécommunications
The 2016 Canadian Telecom Summit
Toronto, 7 juin 2016
Seul le discours prononcé fait foi
* * *
Bonjour à tous,
Merci beaucoup, Mark et Michael, de m’avoir invité au Sommet sur les télécommunications.
Lorsque Mark m’a contacté il y a quelques mois, j’étais encore le critique de l’Opposition pour l’Innovation, les Sciences et le Développement économique. Il a eu la gentillesse de me garder dans le programme de la conférence lorsque j’ai dû démissionner de ce poste, quand j’ai annoncé ma candidature à la chefferie du Parti conservateur.
N’ayez crainte, je ne vais pas essayer de vendre de cartes de membre! Mais je vous invite tout de même à visiter MaximeBernier.com si vous voulez en savoir plus sur ma campagne!
Je dois dire que je me sens un peu comme si le temps s’était arrêté. J’étais sur cette même tribune il y a presque exactement dix ans, le 13 juin 2006, en tant que nouveau ministre de l’Industrie. Certains d’entre vous se souviennent peut-être qu’à l’époque, je préparais une réforme majeure, la déréglementation du marché de la téléphonie locale.
En 2006, de solides câblodistributeurs avaient pénétré le marché de la téléphonie locale. Les téléphones cellulaires étaient en train de devenir omniprésents. Il y avait de toute évidence de plus en plus de concurrence.
Toutefois, plusieurs règles empêchaient toujours les compagnies titulaires de baisser leurs prix ou d’offrir de meilleurs forfaits groupés sans l’approbation du CRTC, sous prétexte que les nouveaux joueurs devaient être protégés.
Pensez à cela une minute : prétendument dans le but de protéger la concurrence, le CRTC empêchait certains fournisseurs de vraiment concurrencer et de faire de meilleures offres aux consommateurs. C’est ce que j’appelle de la fausse concurrence.
J’ai dû me battre durement pour que cette réforme soit acceptée au sein d’Industrie Canada et par le conseil des ministres. Elle a finalement été adoptée quelques mois plus tard. Le CRTC a suivi notre politique et a déréglementé les marchés de téléphonie locale là où il y avait au moins trois fournisseurs de services téléphoniques, incluant un fournisseur de services sans fil. Les prix n’ont pas explosé, comme le prédisaient les opposants. Il n’y avait aucune raison d’attendre plusieurs années de plus avant d’entreprendre cette déréglementation, comme le souhaitait le CRTC.
Il s’agit d’une vieille histoire, mais je pense qu’il y a une importante leçon à retenir ici. C’est que ceux dont c’est le rôle de réglementer cette industrie sont souvent en retard par rapport à son évolution. Ils ne veulent pas se départir de leur contrôle. Entre-temps, l’industrie continue d’évoluer, avec de nouvelles innovations. Nous avons eu de nombreux autres exemples d’un tel comportement depuis ce temps.
Lorsque j’ai pris la parole devant cet auditoire il y a dix ans, j’ai annoncé que le gouvernement fédéral avait déposé au Parlement, pour la première fois, un projet d’instructions au CRTC en matière de politique. Son objectif était d’ordonner au CRTC de s’en remettre le plus possible aux forces du marché lorsqu’il prend des décisions dans le cadre de la Loi sur les télécommunications.
Ces Instructions se voulaient une façon de contrer l’attitude du CRTC de vouloir tout contrôler. Moi et plusieurs autres étions d’avis à ce moment qu’elles forceraient le CRTC à changer d’attitude, à devenir plus flexible et à s’adapter à la nouvelle réalité de la concurrence. Nous avions tort.
Le CRTC a semblé prendre les instructions au sérieux pendant quelques années. Et puis, il a repris ses vieilles habitudes.
Par exemple, il vient de consacrer toute une année à consulter les parties prenantes et le public sur la question de l’Internet à large bande. L’objectif de cette consultation était de débattre à savoir si la large bande doit être considérée comme un service essentiel. Et par conséquent, si de nouvelles réglementations et de nouvelles taxes doivent être imposées à l’industrie. De mon point de vue, il s’agit d’une perte évidente de temps et d’argent.
Selon les chiffres mêmes du CRTC, 96 % des Canadiens ont déjà accès à des vitesses de téléchargement de 5 mégabits par secondes, ce qui est considéré comme le minimum acceptable pour faire à peu près tout ce que l’on veut. Il est vrai que plusieurs Canadiens dans des régions rurales et le Nord n’ont toujours pas de services adéquats. Mais il y a des solutions en voie d’être déployées en ce moment même, y compris un nouveau service par satellite. Et il existe un programme du gouvernement fédéral pour régler ce problème.
Pendant que le CRTC étudie la situation, l’industrie investit des milliards de dollars dans le déploiement de réseaux encore plus efficaces. Déjà, 71 % des Canadiens ont accès à des vitesses de 100 mégabits par seconde. Un service de 1 gigabit est déjà disponible dans certaines régions et deviendra probablement la norme dans quelques années.
Tout cela survient parce qu’il y a une véritable concurrence dans ce secteur, et non à cause de la réglementation imposée par le CRTC. Les consommateurs canadiens sont mieux servis lorsque les fournisseurs de services de télécommunication sont libres de concurrencer et d’investir, et non lorsque des bureaucrates leur disent quoi faire.
J’ai été particulièrement choqué par la décision du CRTC de forcer les entreprises de télécommunication à partager leurs réseaux de fibre optique avec les fournisseurs de services d’Internet soi-disant « indépendants ». Il s’agit d’une nouvelle technologie qui vient d’être déployée au cours des dernières années, bien après l’ouverture du marché à la concurrence.
Et pourtant, le CRTC traite le réseau de fibre jusqu’au domicile comme s’il faisait partie des réseaux historiques des compagnies titulaires. Encore une fois, il cherche à imposer une sorte de concurrence artificielle au lieu de laisser les forces du marché engendrer une concurrence véritable.
Les Canadiens comptent parmi les plus grands consommateurs de données au monde. La seule façon de s’assurer qu’ils obtiennent les services de large bande qu’ils méritent dans les années à venir est de déployer une infrastructure de classe mondiale basée sur les plus récentes technologies.
Forcer certains fournisseurs à partager leurs réseaux avec d’autres ne contribuera en rien à encourager les investissements. Ça ne contribuera pas à apporter plus de concurrence. Et en fin de compte, ça ne permettra pas aux consommateurs d’obtenir de façon durable de meilleurs services à moindre coût.
Je vais répéter ce que j’ai dit sur cette tribune il y a dix ans : Ce n’est pas le rôle du CRTC ou du gouvernement de décider comment ce marché de plus en plus complexe doit évoluer. Cela revient aux producteurs et aux consommateurs.
Lorsque j’ai déposé les instructions en matière de politique en 2006, je croyais que cela enverrait un signal fort au CRTC de modérer ses ardeurs lorsqu’il intervient dans ce genre de dossier et de laisser les forces du marché jouer leur rôle. Il semble toutefois incapable de réaliser que nous avons une industrie dynamique et concurrentielle, comprenant certains des meilleurs réseaux filaires et sans fil au monde.
Peut-être est-il incapable d’accepter cette réalité, à cause de sa nature même de bureaucratie réglementaire. Comme Ronald Reagan l’a déjà dit, « la chose qui se rapproche le plus de la vie éternelle que nous ayons jamais vue sur cette Terre est une agence gouvernementale ». À mesure que l’industrie évolue, le CRTC trouve toujours de nouvelles raisons de continuer à la réglementer, afin de justifier son existence. En faisant ainsi, il ne protège pas les consommateurs, il protège uniquement son propre pouvoir.
Le Groupe d’étude sur le cadre réglementaire des télécommunications a fait, en 2006, plusieurs recommandations pour moderniser l’approche réglementaire. L’une aurait des répercussions très importantes si on l’appliquait.
Comme l’a écrit le Groupe d’étude :
(…) il est temps d’infirmer la présomption actuelle de la Loi sur les télécommunications, selon laquelle tous les services devraient être réglementés, à moins d’une abstention décrétée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Cette présomption devrait être remplacée par une présomption législative stipulant que les services ne seront réglementés que dans des circonstances particulières destinées à protéger les usagers ou à maintenir la concurrence sur les marchés.
Je suis d’accord avec cette proposition. L’industrie des télécommunications est une industrie arrivée à maturité, concurrentielle et elle devrait être traitée en conséquence. Elle n’est pas un terrain de jeu pour les bureaucrates.
Ce que cela signifie concrètement est que nous devrions supprimer progressivement le CRTC dans son rôle de régulateur des télécommunications. Le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique pourrait assumer ses fonctions essentielles restantes, y compris la réglementation sociale. Et le Bureau de la concurrence s’occuperait des questions de concurrence, comme il le fait pour toutes les autres industries.
Il y a un autre domaine de votre industrie où je trouve que les politiques gouvernementales n’ont pas été optimales ces dernières années, et où l’on peut encore une fois contraster les tentatives d’imposer une concurrence artificielle avec ce qui devrait être une véritable concurrence. Il s’agit de la politique dans le domaine du sans-fil.
En 2007, je procédais à des consultations sur le type de règles qui devaient être adoptées pour l’enchère de spectre SSFE qui allait bientôt avoir lieu. Un débat majeur avait lieu : devait-on avoir des règles qui traitaient toutes les entreprises de la même façon ou devait-on réserver une portion du spectre pour les nouveaux entrants, qui auraient pu ainsi l’obtenir à meilleur marché?
Beaucoup de gens soutenaient qu’il fallait réserver des fréquences pour favoriser l’entrée de nouveaux concurrents. Une réserve, comme vous le savez, est l’équivalent d’une subvention aux nouveaux entrants. Les entreprises qui ont besoin de subventions pour concurrencer ne font pas des concurrents très forts.
Ma solution préférée était de ne pas avoir de fréquences réservées et d’ouvrir le secteur aux investissements étrangers.
En ouvrant le secteur aux investissements étrangers, nous aurions pu avoir beaucoup plus de concurrence. Une véritable concurrence. Une grosse entreprise américaine ou européenne aurait peut-être décidé d’entrer dans le marché canadien, ou d’acheter un fournisseur canadien. La simple menace d’une telle entrée aurait été suffisante pour apporter une pression concurrentielle.
Malheureusement, mon successeur a choisi l’option du spectre réservé. Et au cours des années qui ont suivi, chaque enchère de spectre a comporté des règles favorisant les nouveaux entrants.
Cette politique a connu un succès mitigé. Des entreprises régionales bien établies comme Vidéotron, Eastlink, Sasktel et MTS ont acheté des fréquences et lancé leurs services sans fil. Mais il est probable qu’elles n’avaient pas besoin de règles spéciales et de la subvention indirecte, et qu’elles auraient acheté les fréquences de toute façon. Des nouveaux entrants comme Public Mobile, Mobilicity et Wind n’ont jamais réussi à s’établir solidement et ont finalement été achetés par d’autres compagnies.
Le résultat est que des milliards de dollars d’investissements non rentables ont été gaspillés. Des fréquences de spectre ont été mal allouées, sous-utilisées ou inutilisées pendant plusieurs années. Par exemple, Shaw n’a jamais utilisé son spectre avant de le vendre l’an dernier. Le spectre acheté par Vidéotron à l’extérieur du Québec n’est toujours pas utilisé.
Cette situation n’est aucunement à l’avantage des consommateurs. Les consommateurs auraient obtenu des bénéfices beaucoup plus grands si toutes les fréquences avaient été achetées par des entreprises suffisamment fortes pour les utiliser et déployer des technologies avancées dès le départ. Il s’agit d’un autre cas typique où l’on a tenté de susciter une concurrence artificielle au lieu d’enlever le gouvernement du chemin pour que l’on puisse avoir une véritable concurrence.
Presque tout le monde s’entend pour dire que davantage de concurrence est une bonne chose pour les consommateurs. Il est facile de comprendre que lorsque les entreprises sont forcées de se concurrencer, elles ont tendance à offrir de meilleurs services et de plus bas prix. Le problème est de déterminer comment encourager la concurrence. Les politiques interventionnistes qui visent à susciter plus de concurrence ont en réalité l’effet inverse.
La concurrence n’augmente pas lorsqu’on empêche certains joueurs de concurrencer, comme le CRTC le faisait dans le marché de la téléphonie locale.
La concurrence n’augmente pas lorsqu’on force certains joueurs à partager leurs réseaux avec d’autres, comme le CRTC le fait avec la technologie de la fibre jusqu’au domicile.
La concurrence n’augmente pas lorsqu’on taxe et réglemente au lieu d’encourager les investissements, comme le CRTC s’apprête à le faire dans le secteur de l’Internet à large bande.
La concurrence n’augmente pas lorsqu’on renfloue des petits fournisseurs faibles au moyen de subventions, comme mes successeurs à Industrie Canada l’ont fait dans le secteur du sans-fil.
Les marchés concurrentiels n’ont pas besoin de l’intervention du gouvernement pour fonctionner. Ils ont seulement besoin d’être libres.
Voici donc quelques suggestions pour l’actuel ministre responsable de ce dossier – ou peut-être qu’elles feront partie de la lettre de mandat du ministre qui en sera responsable après la prochaine élection!
Débarrassez-vous des mauvaises politiques telles que le partage forcé des réseaux.
Pour vous assurer que d’autres politiques semblables ne seront pas mises en œuvre, supprimez progressivement le CRTC dans son rôle de régulateur des télécommunications.
Tenez des enchères de spectre sans règles préférentielles, de façon à ce que tous aient les mêmes avantages.
Et enfin, ouvrez le secteur complètement aux investissements étrangers.
Si nous adoptons ces réformes, notre industrie des télécommunications sera encore plus concurrentielle et forte, pour le plus grand bien des consommateurs canadiens.
Merci!
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